Pour une éthique antiterroriste

Suite au triple meurtre de Halamish, où un Palestinien a massacré une famille au moyen d’un couteau de cuisine, il y a des voix qui s’élèvent pour remettre en vigueur la peine de mort. Celle-ci n’existe pas en Israël sauf, en théorie, dans les territoires sous juridiction militaire. Mais cette subtilité ne pèse pas lourd par rapport à la jurisprudence, qui est que la seule peine capitale jamais pratiquée en Israël  fut celle d’Eichmann, coupable de génocide.

La peine de mort, tout comme la torture, a été supprimée dans la plupart des démocraties. Donner la mort ou torturer un être humain est avilissant et sadique, même quand il s’agit des criminels les plus abjects. Par ailleurs la peine de mort n’a pas de sens du point de vue logique: le condamné ne souffre qu’entre le verdict et l’exécution.  Vu sous cet angle la prison à vie est une punition plus sévère.

Il y a dans l’opinion publique un sentiment qui grandit, que les conventions internationales concernant les lois de la guerre sont obsolètes quand il s’agit de terrorisme. Aucune organisation terroriste n’est d’ailleurs signataire de ces conventions.

Dans la lutte contre le terrorisme, les moyens conventionnels sont inopérants. Restent les unités spéciales qui ont des méthodes qui ressemblent à celles des terroristes eux-mêmes. Ces unités sont à même de combattre le terrorisme grâce aux moyens technologiques, financiers et matériels. Mais il faut aussi leur donner une justification morale.

Il s’agit, tout comme pour d’autres questions sociétales, de prendre acte de la réalité sur le terrain. Au cours d’une seule génération nous avons vu l’avortement, l’euthanasie et le mariage homosexuel  être légalisés alors que ces pratiques étaient considérées comme criminelles il n’y a pas si longtemps.

Il faudrait que l’agent qui neutralise un terroriste soit seul juge du danger auquel lui-même est exposé. Il doit avoir le droit de ne pas prendre le moindre de risque, aussi infime soit-il. Et au-delà de ce principe de légitime défense, il doit aussi disposer du droit d’anticiper la dangerosité du terroriste en question et l’éliminer s’il constitue un irréductible danger pour la société.

Il ne faut pas laisser seuls face à leur conscience ces femmes et ces hommes qui nous protègent au péril de leur vie. Il ne s’agit pas d’octroyer de permis de tuer à tout un chacun, mais à des personnels formés pour cela. Cela consisterait à appliquer la notion de guerre préventive à la lutte contre le terrorisme.

Non à la peine de mort, mais mort aux terroristes.

Le hasard existe-t-il ?

Le hasard n’existe pasMême en physique quantique l’imprévisibilité des particules est contestée par certains physiciens[1] en ce sens qu’ils estiment que leur état semble aléatoire uniquement parce qu’il nous manque des paramètres, et que quand bien même nous exclurions cette hypothèse il se pourrait qu’il y en ait dont nous ignorons l’existence et qui échappent à l’expérimentation.

Un thème qui revient de manière récurrente dans les échanges entre scientifiques à propos du hasard est celui de l’ignorance des causes de ce qui arrive, ce qui les emmènent à définir le hasard comme processus  aléatoire. Selon cette définition l’on peut certes diminuer les incertitudes  dans une certaine mesure (améliorer par exemple les prévisions météorologiques), mais les causes profondes étant sans liens apparents et infiniment multiples il faut renoncer à en faire le tour.

Cette incertitude devient alors dans le langage courant synonyme de hasard, ce qui est en fait un abus de langage. En effet, même si les causes sont impossibles  à saisir ou même à théoriser, il n’en reste pas moins que ce sont des causes, et partant l’on ne peut qu’en déduire que rien n’aurait pu se produire autrement que ce qui s’est produit. Il ne s’agit donc pas de hasard. Dans ces conditions le monde serait totalement déterminé, et il n’y aurait pas de hasard, mais seulement une  inaptitude humaine à appréhender la globalité des causes.

Si la volonté humaine n’était qu’un effet de la causalité globale tout comme le mouvement des astres, alors nous pourrions trancher dans le sens du déterminisme de Spinoza. Mais selon Yeshayahu Leibowitz [2], la volonté humaine n’est pas l’effet d’une cause. Cette volonté est sans lien avec le monde et est détachée de tout. Du point de vue sémantique, vouloir est l’antithèse de déduire et ne répond à aucune logique. C’est cette aptitude singulière qui permet le libre arbitre.

Si l’on oppose le libre arbitre au déterminisme intégral, alors le postulat de Spinoza s’écroule. Si la volonté humaine est non-contingente comme l’enseigne Leibowitz, alors elle constitue bien une cause, mais pour le coup il s’agit d’une cause imprévisible par définition.

Cela signifie que dans ce cas il y aurait quelque chose d’interférant dans le cours de la Nature sous l’impulsion de la volonté humaine. En d’autres mots, qu’il y aurait deux mondes : celui de la matière régie par les lois de la Nature, et celui de l’esprit qui agirait sur cette même Nature, phénomène inconnaissable  mais qu’il serait justifié de qualifier de hasard du fait qu’il serait sans cause. Cela correspondrait  à l’intuition de la Torah comme quoi l’homme serait à l’image de Dieu, c’est à-dire cause de soi-même.

Nonobstant Spinoza, la nature humaine  est ainsi faite que la question du déterminisme ne peut avoir de réponse philosophique, parce que le simple fait que l’homme se pose cette question est en soi une réfutation du déterminisme intégral.

Dès lors que l’homme pense avoir une conscience, il ne peut faire autrement que de se penser libre. Et s’il est libre il a un effet sur le monde. Et s’il a un effet sur le monde c’est que le hasard existe.

[1] Einstein, entre autres.

[2] Penseur du judaïsme, philosophe et scientifique.

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A écouter sur France Culture: causerie sur le hasard menée par  le physicien Etienne Klein.

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